Actualités et évènements



Les insignes de chevalier de la Légion d’honneur à Lamia Moubayed Bissat
2017-04-11

L'ambassadeur de France, Emmanuel Bonne, a remis à la directrice de l'Institut des finances Basil Fuleihan, Lamia Moubayed Bissat (Membre de la Société des membres de la  légion d’Honneur-Liban), les insignes de chevalier de l'ordre national de la Légion d'honneur française. La cérémonie a eu lieu vendredi soir à la Résidence des Pins de Beyrouth en présence des proches de Mme Bissat et de nombre de personnalités, parmi lesquelles le député Ahmad Fatfat, l'ancienne députée Nayla Moawad et Mme Mona Hraoui.
L'ambassadeur de France a loué à cette occasion le parcours « remarquable » de Mme Bissat avant de lui remettre la Légion d'honneur, décoration qui a couronné ses années d'engagement au service de l'État. « Servir l'État, c'est servir une certaine vision de la société. C'est cela que vous avez mis en œuvre », a souligné M. Bonne. Il a par ailleurs félicité Mme Bissat pour ses « principes » et ses « contributions relatives, notamment, à la protection du patrimoine culturel libanais, la promotion de la sécurité routière ainsi que la mixité et l'égalité au Liban ». L'ambassadeur a enfin tenu à rendre hommage à la « femme de conviction » que représente Mme Bissat en rappelant que la France a confiance dans le Liban qu'elle sert, dans sa « diversité, sa pluralité et son ouverture ».
Mme Lamia Moubayed Bissat a, de son côté, tenu à saluer le travail de toute l'équipe de l'Institut des finances, « soudée par des valeurs communes », après avoir remercié l'ambassadeur Bonne de lui avoir décerné la plus haute distinction française. Elle a en outre souligné la nécessité de préserver le Liban contre tout « mépris » qui « mettrait en péril la stabilité du pays ». Mme Bissat a par ailleurs qualifié les relations que l'Institut Basil Fuleihan a tissées entre le Liban, la France et les autres partenaires de « révolution pacifique qui crée des liens et décloisonne les institutions ». « Il faut avoir le courage nécessaire pour oser l'État », a-t-elle conclu.

 

Allocution de Mme Moubayed Bissat:

Allocution de Mme Lamia Moubayed Bissat

Cérémonie de Remise des Insignes de la Légion d’Honneur

Résidence des Pins, le vendredi 7 Avril 2017

Oser l’Etat

 

Ouverture

Ce soir, mon émotion est grande et vous m’en excuserez.

Etre accueillie par vous, Monsieur l’Ambassadeur, Cher Emmanuel, en présence de ma famille et vous tous, Excellences, mesdames et messieurs, dans l’ordre de la légion d’honneur, fait chaud au cœur, mais invite également à rester humble devant une telle distinction.

Peut-être en tendant bien l’oreille, percevez-vous déjà les battements du cœur de ma mère, de mon époux et de mes enfants, ici présents, et bien sûr les miens.Je pense aussi, à cet instant, avec émotion  à ceux qui nous ont quittés.

Mais, ce soir, chers amis, nous ne célébrons pas une personne, nous célébrons une histoire commune à laquelle vous avez tous contribué.Ce soir l’hommage est au travail remarquable que réalise l’Institut des Finances Basil Fuleihan depuis maintenant plus de 20 ans.

Cette distinction confirme le soutien de la France à sa vocation et  à son ambition, qui est de devenir une grande école de gouvernance qui rayonne dans cette région.

Hommage à vous, mes chers compagnons, l’équipe très féminine de l’Institut et ses « gentlemen ». Nous formons, depuis maintenant vingt ans, une équipe soudée par des convictions et des valeurs communes, qu’elle transforme en action. Je souhaite, ce soir, vous déclarer toute mon admiration. Sans vous, sans votre force, sans votre passion, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui.

Hommage à vous, Monsieur le Ministre Georges Corm. Vous qui m’avez confié cette responsabilité, malgré mon jeune âge (c’était il y a longtemps). J’espère que vous ne le regrettez pas.

Monsieur le Premier Ministre Fouad Siniora, père fondateur de cette grande Institution, vous m’avez soutenue sans réserve. A vous, j’adresse mes hommages les plus respectueux.

Ma reconnaissance la plus sincère va également aux ministres des Finances successifs, et au ministre actuel, Monsieur Ali Hassan Khalil.

Grâce à votre soutien, Messieurs les ministres, l’Institut jouit d’une notoriété affirmée ; un gage de sérieux pour les partenaires internationaux dont je salue la présence ce soir.

Bilan Personnel

Ce matin, en interrogeant Google, au sujet de la date de cette cérémonie du 7 avril – le numéro 7 en Arabe est signe de gloire –J’ai découvert, qu’elle coïncidait avec le 17e jour du 7e mois du calendrier révolutionnaire français.

Je me suis dit que cette coïncidence est un rappel de ce que la France a inspiré de mieux en moi : ce désir de Liberté, ce sens de la Justice, des droits intangibles à la fois politiques et sociaux, ce goût de la « révolte » au sens pacifique (d’Albert Camus), un appel qui m’a poussé, il y a seize ans, à renoncer à une carrière bien tracée aux Nations unies, pour prendre les rênes de ce projet phare de la coopération franco-libanaise qu’est l’Institut, avec la mission de le transformer en une institution publique bien ancrée au sein de l’Etat libanais, au service de ses fonctionnaires et de ses citoyens. Je n’imaginais pas que je serais un jour une fonctionnaire libanaise après avoir été une fonctionnaire internationale. Et je ne l’ai jamais regretté !

Je ne l’ai jamais regretté, car, j’ai découvert que je réalisais mon projet de vie, celui de préparer un avenir meilleur pour mes enfants ; un avenir qui leur éviterait de vivre les moments d’angoisse, de terreur et de séparation que j’ai vécus, enfant, à proximité des lignes vertes qui ont coloré en rouge et noir les deux visages du Beyrouth que je chéris. Au fil des années, j’ai été à l’écoute des femmes et des hommes aux commandes de la fonction publique, y consacrant leur plus grande énergie, y sacrifiant les meilleures années de leur vie et souvent, leurs propres vies.

J’ai perçu toute la difficulté de concilier l’esprit des accords politiques qui permettent une sortie des conflits et le souci de l’efficacité de l’appareil de l’Etat, par sa « domination légale rationnelle » pour citer Max Weber. Or, ce mépris pour l’Etat, nous le savons mieux aujourd’hui par les leçons des printemps échoués - ce mépris Mesdames et messieurs - ne peut que fragiliser pour finalement mettre en péril, la stabilité politique d’un pays.

Pourquoi cet hommage ? Quel bilan?

L’hommage rendu ce soir, Chers amis, est aux écoles du service public qui portent les enjeux des métiers de l’Etat et de ses valeurs. « servir sans s’asservir » adage connu de l’ENA-France

Ces écoles, ont été longtemps reléguées au second rang dans nos pays, alors qu'ailleurs on n’envisage plus de nommer des fonctionnaires sans les avoir formés pour assumer leurs responsabilités futures.

Ce soir, c’est l’occasion de dire encore une fois, que développer c’est tout d’abord valoriser le capital humain, base de tout progrès, Et que l’enjeu de la formation n’est donc pas second, qu’il est lié au projet d’une fonction publique d’avenir.

Depuis sa création, L’Institut des Finances a pris appui d’abord sur la France mais aussi sur nos partenaires européens et arabes. Ensemble, nous avons bâti une institution apprenante et militante - un bel instrument à vocation locale et régionale.Nos fonctionnaires sont formés auprès des écoles Françaises du service public les plus prestigieuses et nos formateurs s'y perfectionnent.

Ensemble, nous avons établi une coopération équilibrée, basée sur les atouts de chacun. Le tandem Franco-Libanais répond aux demandes d’appui en matière de gouvernance, et le modèle de l’Institut s’exporte en Palestine, en Jordanie, au Maroc mais aussi en Serbie et en Côte d’Ivoire, bref, partout au monde où le besoin existe !

20 ans après, c’est une révolution pacifique qui crée des liens, qui décloisonne les institutions, qui rapproche, encore plus, les deux rives de notre méditerranée. Le réseau national de formation lancé en 2013 avec l’Omsar et le conseil de la fonction publique fédère aujourd’hui 24 écoles et service de formation. Une culture nouvelle fleurit et de nouveaux centres prennent vie, le dernier en date au ministère de l’Économie.

Un autre réseau régional : le GIFT-MENA devient un outil de développement Sud-Sud tout en favorisant l’ouverture vers les voisins du Nord. Et, il inspire déjà l’Afrique subsaharienne.Tout cela, Mesdames et messieurs, c’est du tangible, du réel, de la vraie coopération tridimensionnelle ; un atout majeur en Méditerranée.

Monsieur l’Ambassadeur, vous qui aimez tant ce Liban. – et vous le dites si bien ???? ?? ?????  . Notre partenariat, grâce à vous, se réinvente d’année en année. Hommage à l’équipe de cette Ambassade avec laquelle nous travaillons avec plaisir et efficacité.

Les Difficultés

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Je dois avouer que le chemin était semé d’embûches. Mais je ne reviendrai pas sur les difficultés que nous connaissons tous : celles de gérer sans budget, rubicond heureusement dépassé, de naviguer à vue.

De voir les réformes ailleurs progresser tandis que les nôtres languissaient.

De garder espoir quand on fait ses adieux à nos meilleurs talents que le système rejetait.Par moment, croyez-moi, l’ouverture et le partage ont été synonymes d’amertume et parfois d’indifférence.

Mais nous étions - nous le sommes toujours - décidés à persévérer. Parce que nous croyons en l’Etat, Parce qu’il est notre bien commun le plus précieux,que nous sommes fiers de le servir,

et que nous aimons notre métier. S’il est un enseignement clair de l’histoire en matière de développement, et vous le savez mieux que moi, c’est qu’il ne peut se faire sans un Etat développeur. Malheureusement, un appareil d’Etat médiéval/clanique/ partisan ne peut jouer ce rôle. Une administration performante passe nécessairement par une gestion rationnelle des recrutements, des formations et des processus de carrière.

Plus les procédures sont adaptées, réfléchies , incorruptible, plus les standards des services au citoyen sont de qualité, Et le contrat social devient un contrat de confiance.  Or, quand on ignore cette logique, vertueuse et cartésienne, qu’on dénigre les valeurs du mérite et de l’équité, les institutions sont poussées à l’échec. Dans ces conditions les investissements fuient, l’économie stagne, le malaise social s’aggrave, les tensions montent et chacun sait que le partage d’un gâteau / se fait / au couteau….

L’Appel

Au fil des années, l’Institut a été à l’écoute des citoyens et des fonctionnaires qui ne cessent de lancer des appels et de solliciter la classe politique et les organisations internationales.

« Nous voulons Singapour et non pas Athènes…. » disent les citoyens, des administrations qui font plus avec moins. Flexibles, entreprenantes, décloisonnées, à l’image du libanais.

« L’Etat c’est nous », lancent les fonctionnaires. C’est à nous que revient la lourde tâche d’assurer la cohérence, de préserver le pays, d’anticiper l’avenir. Nous avons un visage humain et nous sommes les garants du vivre-ensemble. Aidez- nous à mettre en place un service public axé sur les compétences et tenez nous responsables de nos erreurs et de nos actions!  Aidez- nous à résister à l’hégémonie de l’arbitraire.

Aux organisations internationales, l’appel est clair : faîtes évoluer vos modèles de coopération. Eloignez les options de substitution. Retrouvez-nous à mi-chemin, sur la base du respect des institutions, même fragilisées. Ces appels, Mesdames et Messieurs, méritent d’être écoutés.

Edgar Morin disait « on ne peut plus replâtrer, il faut se mettre à construire et ça ne manque pas d’architecte ». Ces appels méritent d’être écoutés surtout en ces moments, où des défis colossaux s’imposent à notre pays à cause de la crise syrienne et l’échec accablant de la communauté internationale pour y trouver issue.

La CONCLUSION

J’ai choisi de conclure, Mesdames et Messieurs, avec les mots d’un révolutionnaire socialiste du XIXe siècle, souvent associé à tort aux utopistes: Auguste Blanqui disait « Les malheureux n’ont que la patrie ».Dans une région déchirée par les violences, par le doute et le discrédit, où patries, clans et religions se confondent, les malheureux, Mesdames et Messieurs, …… n'ont que l'Etat. Aurions-nous le courage de laisser construire, avec sagesse et économie, des institutions efficaces, responsables et ouvertes … comme l’ont fait un jour les grands de ce pays. ?

Aurions-nous le courage d’oser l’Etat!?

Les remerciements

Excellences, Mesdames et messieurs, Chers amis,J’ai servi mes deux pays. J’ai vécu tous les jours mes convictions. Quelle chance ! J’ai découvert, dans notre monde arabe, des institutions exceptionnelles qui sont devenues des partenaires du développement.

J’ai connu des femmes et des hommes loyaux, discrets, soucieux de respecter leur devoir de réserve, qui continuent de croire, comme moi, que l’Etat (fait partie de l’avenir) que l’Etat est une idée qui a de l’avenir. Je les remercie, je vous remercie pour ce beau chemin: 

Mes derniers mots, iront, si vous le permettez à ma famille:

  • En premier lieu,  à ma mère, Asma el Hajj, ma muse, toi qui nous a enseigné à aimer la vie quand la mort nous entourait: les mots me manquent, maman, pour décrire mon admiration, mon amour et mon éternelle reconnaissance.

  • A ma sœur Alia, énarque émérite, qui m’a donné le goût de la chose publique, et à mon frère Ali, mon complice, ma force cachée 

  • A Imad, mon fidèle partenaire, âme gracieuse et généreuse, source de mon endurance.

  • A feu Adnan et sa bien-aimée Amal, A la grande famille des Bissat : c’est grâce à votre amour, que je peux vivre mes passions.

  • Et enfin à mes deux étoiles célestes: Youmna et Sarah, qui ont parfois souffert de certaines négligences involontaires lorsque le travail m’accaparait, et

  • à mes deux neveux Ziad et Jad, jeunes espoirs de ce pays:

  • je vous dis « notre pays vous apparaît tel qu’il est c’est à dire inaccompli ». Mais  ne renonçons pas, ne cessons pas la lutte  « Soyez réalistes : demandez l’impossible! »

 J’ai déjà trop parlé, malgré moi. Merci encore de votre présence.

 Vive le Liban, Vive la France et vive la Coopération ! 

© 2024 - SMLH-LB
Le développement de ce site a été acquis par la généreuse contribution de la part de M. Le consul Roger Samaha
(membre du comite administratif de la SMLH -Liban